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Accueil → Asie du Nord-Est → Japon → L’Eglise catholique réitère au gouvernement son appel à sortir du nucléaire






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Ce 6 juin, le pape François a reçu le Premier ministre japonais Abe Shinzo pour une visite qui témoigne des bonnes relations qu’entretiennent le Saint-Siège et le Japon. La veille cependant, l’évêque de Niigata, Mgr Kikuchi Isao, avait rappelé dans un entretien avec le site d’information spécialisé sur le Saint-Siège et l’Eglise, Vatican Insider, que l’Eglise du Japon était résolument opposée au projet gouvernemental de remise en marche du parc des réacteurs nucléaires japonais. « Nous demandons au Premier ministre Abe de renoncer à l’énergie nucléaire », avait-il déclaré.

Dans un pays où les catholiques ne représentent guère plus de 0,5 % de la population, les évêques japonais n’ont jamais hésité à prendre position sur différents sujets d’intérêt général. Après la catastrophe de Fukushima de mars 2011, ils avaient, à l’issue de leur assemblée plénière de novembre 2011, rendu public un document intitulé : « Mettre fin à l’énergie nucléaire aujourd’hui ».

Cet appel s’inscrivait à la suite de la parution d’un document de 2001 où l’on pouvait lire la préconisation suivante : « Pour éviter une tragédie, nous devons développer des moyens alternatifs sûrs de produire de l’énergie. » Et, avant cela, en 1999, la Commission ‘Justice et Paix’ de l’épiscopat se prononçait pour un abandon du nucléaire comme moyen de produire de l’électricité.

La préconisation des évêques japonais de renoncer au nucléaire remonte donc à de nombreuses années. Plus qu’un simple abandon de cette source d’énergie pour des raisons de sûreté, l’épiscopat appelle de ses vœux un changement de paradigme économique. Là où les responsables du pays, qu’ils soient politiques ou économiques, mettent en avant la croissance de la richesse économique comme objectif, l’Eglise souhaite que les Japonais « changent de style de vie ».

« Si nous persistons à préserver notre style de vie actuel, qui suppose un niveau très élevé de consommation d’énergie, promouvoir des sources d’énergie alternatives [au nucléaire] me semble bien hypocrite, explique Mgr Kikuchi au Vatican Insider. Chaque personne doit être vraiment prête à renoncer volontairement à quelque chose pour le bien commun de l’humanité, de ses enfants et de toutes les créatures que Dieu a faites. »

L’évêque ne cache pas que la position de l’épiscopat sur ce sujet n’est pas forcément comprise par les catholiques japonais eux-mêmes. Certains d’entre eux « semblent apprécier la décision du gouvernement [de relancer une partie du parc nucléaire] car ils pensent que cela leur permettra de conserver leur style de vie ; ils ont peur de perdre quelque chose », précise-t-il, en reconnaissant que la question n’est pas seulement technique (le choix de telle ou telle source d’énergie pour produire de l’électricité) mais « touche chacun de nous en profondeur ». Aujourd’hui, ajoute-t-il, la nation japonaise « est appelée à faire un vrai examen de conscience afin de décider des orientations qui fixeront son avenir ».

Après la catastrophe de Fukushima de mars 2011, le gouvernement du Premier ministre Kan Naoto avait pris des mesures ordonnant, pour des raisons techniques et des études de sûreté, l’arrêt de la cinquantaine de réacteurs qui composaient alors le parc nucléaire du pays. Son successeur, Abe Shinzo, au pouvoir depuis un an et demi, s’est au contraire attelé à redéfinir la politique énergétique du Japon en revenant sur cette décision de mise en sommeil progressive des centrales nucléaires. En février dernier, après des mois de négociations avec les sceptiques de sa formation, le Parti libéral-démocrate, et son allié, le Nouveau Komeito, un Plan de base pour l’énergie a été rédigé ; le nucléaire y est présenté « comme une source importante d’électricité » pour le long terme et la réactivation d’une douzaine de réacteurs annoncée comme souhaitable à court terme.

Au sein de la population, les études et les sondages indiquent qu’une grande majorité des Japonais souhaite l’abandon à terme du nucléaire et son remplacement par des énergies propres et renouvelables, mais les opinions sont plus partagées sur le court terme. Placé dans l’obligation d’importer massivement et au prix fort des hydrocarbures pour faire tourner des centrales thermiques fortement productrices de CO², le Japon ne voit pas comment rapidement produire une électricité « verte » susceptible de prendre le relais du kilowatt nucléaire.

Evêque de Niigata, un diocèse situé sur la côte Ouest du Honshu, à l’exact opposé de Fukushima, Mgr Kikuchi, préside également la Caritas Japon, très engagée auprès des populations déplacées par les radiations émises par la centrale de Fukushima Daiichi. S’il estime qu’il est du devoir des catholiques de « se tenir aux côtés des victimes de la tragédie qui s’est produite il y a trois ans », il ajoute que cet « accompagnement dans la miséricorde » doit aller de pair avec un appel « à s’engager sur un chemin bénéfique pour les générations à venir du Japon ». (eda/ra)

(Source: Eglises d'Asie, le 6 juin 2014)